Enrico Rava Quintet de rêve ?

oui, mais de rêve éveillé, tant la musique présentée par un Enrico Rava fier de ses recrues suppose une concertation sans temps mort. Le temps réel de l’improvisation, si l’on veut, à condition que l’on n’oublie pas tout ce que ce concept implique, en jazz de préparation et de références communes. Ce bagage réuni, un leader peut lâcher la bride à ses hommes et obtenir la musique qu’il a en tête. d’où la sensation que le concert offert par Rava reflétait sans distorsion son univers à lui, celui d’un metteur en sons sans rival dans le paysage musical italien.
On dit italien pour insister sur l’ancrage européen de cette musique où se trouvent associés 4 compatriotes du trompettiste ouverts à toutes les musiques contemporaine, populaire ou free…

Cette ouverture dit bien à quel point ce jazz là n’est pas européen contre son grand frère américain ,mais veut unir la grande histoire du jazz et les traditions nationales auxquelles il est légitime de la confronter. Tout envoûté qu’il soit par Miles Davis et Chet Baker, Rava est vite rejoint par d’autres références.

Fellini n’est jamais très loin de ses splendides envolées alimentées à un fond de truculence baroque. Le jeu toujours plus aéré de ce jeune septuagénaire est magnifié par le contraste avec Giovanni Guidi, malaxeur de clavier que l’élégance de son ainé oriente vers un self-control plus expressif que ses débordements.
Entre ces deux extrêmes, Gabriele Evangelista impressionne par sa forte présence structurante, Fabrizio Sferra par son sens de la relance.

Rava & Gianluca Petrella,

Quant à Gianluca Petrella, l’autre grand souffleur de la soirée, il soumet ses pulsions à une culture « trombonisitique » étendue d’où il lui arrive de s’évader en bête traquée. Le jeu du tromboniste n’abuse pas des effets de style et autres gimmicks : pas de growls gratuits ou de glissandos impromptus. Il utilise toute la tessiture de son instrument, en s’appuyant sur un groove élastique.

Et derrière sa virtuosité et délicatesse se cache un pur humour , partagé par ses compères. Un combo au diapason du boss dont il aiguise encore le goût de l’errance gourmande.